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Roumanie 1989,vous avez dit Révolution?
Ronald reagan with mikhail gorbachev in red square during his visit to the ussr, may 1988
L’arrivée de Michael Gorbatchev au pouvoir va modifier les liens entre les USA et l’URSS, et de ces liens vont se faire et se défaire des pays et des régimes, des équilibres nouveaux vont se constituer. En cela l’année 1989 présente un modèle exceptionnel de redistribution des cartes et de nouvel équilibre. Le rapprochement USA-URSS entraîne aussi celui des services secrets français (DGSE) et anglais (MI5), et ce rapprochement a pour objet, entre autres, de toucher l’histoire de la Roumanie directement.
La première étape est la disgrâce dans laquelle Ceausescu a décidé de faire tomber Ion Iliescu. Ce dernier qui était pressenti comme son digne successeur dans les années de plomb est soudain suspecté de sympathie avec la politique de Gorbatchev (Perestroïka). Cette suspicion prend forme lors d’un entretien entre les deux chefs d’Etat, quand Gorbatchev demande à Ceausescu d’entamer un processus de libéralisation du pays. Iliescu est le lien entre les deux pays, Ceausescu comprend de suite l’enjeu et les risques, il écarte ce dernier du premier carré des dignitaires et oppose un refus catégorique à Gorbatchev.
Devant l’attitude déterminée de Ceausescu Gorbatchev s’accorde, avec George Bush, à changer le régime et faire tomber Ceausescu. Entre ces deux grandes puissances le marché est simple, Gorbatchev pilote l’affaire « Roumanie » et Bush s’occupe de l’Amérique centrale, alors en pleine effervescence (Nicaragua et Salvador). Comme preuve de la bonne volonté des deux, Gorbatchev a le soutien des services secrets français et anglais, les USA sont laissés libres et l’URSS cesse ses approvisionnements d’armes envers ces deux pays que sont le Nicaragua (sandinistes) et le Salvador (front Farabundo Marti).
Sous l’égide de Ion Iliescu est créé, début 1989, un Comité de salut national qui va regrouper ceux que l’on découvrira à la télévision nationale dès la fuite de Ceausescu, les bases du coup d’Etat sont posées. Il reste à faire en sorte que cette tentative ne se transforme pas en guerre civile, car le pouvoir en place à un immense dispositif interne : la Securitate, et une armée commandée par des généraux qui ne sont pas forcément prosoviétiques.
Soutenu activement et matériellement par les services français, hollandais et anglais, le Comité de salut national s’organise, en occident commence une campagne d’information sur les méfaits du régime en place en Roumanie, sur la systématisation, ce remembrement forcé et l’installation des villageois dans des immeubles et sur les suppressions de villages.
Bizarre que ce système, commencé dans les années 1970, n’intéresse effectivement les médias occidentaux qu’en 1989.
Une première étape est franchie, le ralliement des élites d’origine maghyare. Là ce sont les services secrets hongrois qui se sont activés dans les départements où cette communauté est particulièrement nombreuse, dans certains départements elle atteint 90% de la population.
Un seconde a été négociée aisément avec les opposants au régime Ceausescu, tant ceux en exil que ceux assignés à résidence, tous sont contactés, tous obtiennent la promesse d’une place au soleil si ils apportent leur soutien, tous vont accepter, tous vont obtenir cette place au soleil, et encore plus criant, aucun d’entre eux ne va être tué durant les événements de décembre 1989.
Une troisième étape est franchie, l’entrée sur le territoire roumain, et incognito, de personnes en provenance du nord, le grand-frère soviétique est derrière. L’armée roumaine commence à être retournée, y compris des généraux qui apparaîtront un temps au gouvernement en 1990 (Stanculescu à la défense) et ensuite serviront de bouc émissaire. Les généraux Stanculescu et Chitac, seront jugés et condamnés à de lourdes peines de prison pour les morts de Timisoara. Par contre le Général Geoana (père de Mircea Geoana, malheureux candidat à la présidentielle de 2009) qui commandait la place de Bucarest en décembre 1989 passe au travers de tout. Etonnante impunité. Il en est de même pour le général Vasile Milea, qui a encore aujourd’hui sa rue dans Bucarest, lui qui avait toutefois envoyé les chars contre les paysans roumains lors des révoltes de 1962. Quand à la Securitate elle a déjà été contactée suite à la chute du mur de Berlin, puis la rencontre de Malte entre Bush et Gorbatchev le 3 décembre 1989 a finalisé le dossier Roumanie. Plus concrètement c’est Iulian Vlad, son Commandant du Département pour la Sécurité de l’Etat qui aurait alors été retourné et coopté pour faire partie du groupe des putchistes.
Les filets sont tendus, il reste à faire démarrer l’opération, c’est chose faite d’abord le 17 décembre à Timisoara, puis le 21 décembre à Bucarest quand un événement alors inimaginable se produit, Ceausescu est hué lors de son discours à la tribune, sur cette place qui va prendre ensuite le nom de Place de la Révolution.
Dans ce pays où chacun suspecte chacun, ou le frère peut dénoncer la sœur, où le gardien de cage d’escalier rapporte tous les agissements des propriétaires et locataires, où tout le monde est en permanence sur ses gardes, où tout est noté, consigné, une foule immense conspue tout à coup le dictateur. Qui pourrait croire en la spontanéité de ce mouvement ?
Par contre l’histoire du charnier de Timisoara fait la une de la presse occidentale, jusqu’à ce que soit démontré qu’il s’agit d’un montage sordide, on a déterré des cadavres pour faire plus vrai. Ce qui ne sera découvert que plus tard est la vraie histoire des cadavres. Plus de 50 personnes ont été tuées le 17 décembre à Timisoara, les cadavres ont été transportés à Bucarest puis incinérés. Parmi ces personnes une quarantaine n’aurait jamais été revendiquée par aucune famille roumaine, l’hypothèse de la présence d’agents russes sur Timisoara pour lancer le coup d’Etat part de cet événement. Cette hypothèse est plus que crédible même si elle n’a aucun rapport avec les morts de Timisoara. En effet, dans les mois qui ont précédé le coup d’Etat sont entrés sur le territoire roumain environ 200 agents de la SPETZNAZ, troupes spéciales de commandos parties intégrante de la GPU (Service d’information militaire de l’armée rouge), qui ont pour rôle d’intervenir dans la préparation, sur le terrain, des coups d’Etat et des invasions. Ils ont ainsi été présents en Tchécoslovaquie en 1968, en Afghanistan en 1979. Leurs homologues américains étaient au Chili juste avant le coup d’Etat de Pinochet. En France la tristement célèbre 5ème colonne allemande a été particulièrement active dans la désorganisation arrière de la ligne de front en France en 1939.
Les services de ce genre n’existent pas d’hier, comment auraient-ils pu ne pas être présents pour une telle opération !
Les 21 et 22 décembre 1989 représentent une clé capitale pour la réussite ou l’échec du putch car la Securitate, qui initialement a commencé par tirer sur la foule, opère un retrait brusque et laisse l’armée gérer les manifestations, notamment via sa Direction de l’information (ancienne DIA et actuelle DGIA). Mais de toute manière, pour les russes, plus aucune négociation n’est envisageable au vu de cette attitude ambigüe de l’armée et de la Securitate, et Gorbatchev va donner aussi l’ordre de se débarrasser physiquement de Ceausescu. Non seulement il en sait trop, mais surtout la Securitate pourrait continuer à le soutenir, même partiellement, et l’armée, dont une partie n’est pas sous le contrôle des putchistes, risque se retourner contre les manifestants et le Comité de salut national, d’ailleurs certaines de ses unités ont déjà ouvert le feu, y compris sur d’autres unités militaires (aéroport d’Otopeni). Le risque de guerre civile est trop grand, l’élimination physique du dictateur est probablement la meilleure solution pour éliminer ou à tout le moins diminuer ce risque.
Comme le coup d’Etat s’est passé pratiquement comme prévu, ces agents SPETZNAZ sont rentrés dans leur pays en janvier 1990.
Sur tout ce qui vient de se passer, personne ne s’est posé de question, pas même les médias occidentaux, car le travail de désinformation a été extrêmement bien mené. Pourtant quand on regarde les cérémonies officielles de l’époque, celles organisées dans tous les pays de l’est, on est frappé par la jovialité des gens, les drapeaux, les sourires, l’enthousiasme, et on en déduit aussitôt que ces gens qui sont autorisés à manifester sont triés sur le volet. Comment peut-on sérieusement imaginer qu’il n’y ait pas eu de triage et de manipulation en ce 17 puis en ce 21 décembre !
Donc le coup d’Etat est lancé, il va aboutir à la prise de contrôle de la télévision nationale, avec en tête un prétendu opposant au régime devenu acteur de cette action, Mircea Dinescu. Il va aussi aboutir au jugement et à la condamnation à mort des époux Ceausescu par un tribunal constitué pour l’occasion et dont la sentence a été rédigée à l’avance et entre autres par Gelu Voican Voiculescu, membre du comité de salut national, et membre du jury aux côtés de Ion iliescu et Petre Roman. L’histoire de ce Voican Voiculescu est en elle-même intéressante. Grand, belle et longue barbe à la Karl Marx, il est présent partout alors que quasiment personne ne le connait. C’est le prototype de la personne qui est entrée parce qu’il y avait de la lumière et est resté en se greffant sur tout ce qui se faisait, accepté grâce à sa « gueule ». Arnaqueur de cette prétendue révolution, il est devenu vice 1er ministre grâce à sa présence sur une photo de groupe aux côtés de Ion Iliescu. Quand à Mircea Dinescu, devenu multimillionnaire depuis, son assignation à résidence était purement formelle. Les vrais opposants étaient incarcérés dans des prisons spéciales, notamment à Pitesti, certains étaient éliminés physiquement directement en prison (Gheorghe Ursu par exemple), d’autres étaient transmis aux travaux forcés (creusement du canal du Danube), d’autres étaient entrés en résistance et vivaient dans les monts Fagaras où beaucoup sont décédés, d’autres enfin avaient fui à l’étranger.
Ce qui est certain est que Iliescu va dès lors prendre les rênes du pouvoir, Petre Roman va être nommé premier ministre, Voican Voiculescu sera plus tard nommé Ambassadeur. Par mal pour quelqu’un qui a fait condamner à mort son président que de devenir diplomate de carrière ! L’histoire de Petre Roman aussi est intéressante, membre de la nomenclature sous Ceausescu, il a deux défauts pour Elena Ceausescu, il est juif et s’est entiché de sa fille. Il est donc décidé de l’envoyer faire ses études en France, à Toulouse, histoire de casser cette relation. De retour au pays, il va venir participer à cette « révolution » transporté en hélicoptère de Constanta jusqu’à Bucarest par les services de sécurité.
Vous avez dit révolution ?
Ce que nous pouvons tirer de ces événements est que la présence des troupes spéciales de commandos soviétiques et l’intervention de leurs homologues français, américains et anglais au niveau de l’armée roumaine et d’une partie des dirigeants de la Securitate, ont permis de disposer, à l’intérieur même des organes de répression, d’un contrepoids énorme.
Ce que nous pouvons également retirer de cela est que, outre les services secrets, ce sont les ambassades de leurs pays respectifs qui ont été des lieux d’agitation et de manipulation, y compris de la presse et des médias étrangers.
4 heures d’agitation, quelques jours de mitraillages à tort et à travers, 1.500 civils et une cinquantaine de militaires morts, et au niveau de l’appareil d’Etat 2 morts, Nicolae et Elena Ceausescu.
Qui ose encore parler de révolution ?
À la fin de 1982, la Roumanie a atteint le sommet de la dette extérieure de 11 milliards de dollars, dépendant du FMI, en accord avec le milliardaire George Soros, dont l’implication dans les événements de 1989 a été avérée par la suite, et qui avait prévu une série d’opérations spéculatives désastreuses pour la Roumanie.
Après ces opérations spéculatives, la Roumanie entrait dans un état de blocage financier et de cessation de paiement. Mais Ceausescu a pris le FMI par surprise, s’engageant après 1985 à payer toute la dette extérieure avant la date prévue, évitant à la Roumanie de tomber dans le piège des grandes transactions boursières du FMI. Soros a réussi plus tard à réaliser un coup de 1,1 milliard de livres Sterling par l’intermédiaire de la Bourse de Londres. Malgré cela, le FMI a imposé des sanctions contre la Roumanie pour le paiement anticipé. Parce que le FMI, dirigé par les Etats-Unis, a exigé de la Roumanie le remboursement de la dette avec un intérêt triplé, une grande partie de la production agricole et industrielle du pays devait prendre le chemin de l’exportation, créant les célèbres files d’attente alimentaires que nous avons connues. L’énergie thermique fut rationnée et l’essence distribuée à la carte.
C’est ainsi que, depuis 1987, les Etats-Unis ont déclenché une intense campagne de diabolisation de Ceausescu par les médias occidentaux.
A la chute du mur de Berlin et de l’Union soviétique ,Américains et Européens commencent à débloquer beaucoup de moyens pour "soutenir" , via une myriade d’ONG, les nouveaux pays issus de l’ex-URSS .Ces organisations font la promotion des "valeurs" de l’Occident...
Découvrez :Comment se préparent les révolutions de couleur
Notes:
Avec Ceausescu, les frigos étaient pleins
«Quel dictateur ?!», s'insurge une femme âgée venue poser des fleurs sur la tombe en marbre rouge érigée dans le cimetière Ghencea de Bucarest. «Les hommes politiques d'aujourd'hui sont-ils capables de faire autant que Ceausescu ? Pas du tout, ils ne font que voler»
La méthode Soros pour les nuls, l’exemple roumain
De nos jours,la Roumanie est l’un des pays européens les plus orientés vers le projet géopolitique atlantiste. Malgré ses habitants chrétiens orthodoxes, ses élites suivent toujours un cours strictement pro-UE et pro-américain. La raison en est très simple : c’est un pays dont les élites et la société civile ont été complètement formatées par les ONG américaines, notamment par celles de George Soros. L’histoire de la Roumanie mérite une attention particulière, car elle est exemplaire par sa réussite en montrant comment les méthodes d’établissement de la domination libérale occidentale fonctionnent réellement.
Tags : Roumanie, Gorbatchev, Reagan
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