L’Allemagne recréa son empire grâce à l’Union Européenne.
Photo:La France et l'Allemagne se disputent le leadership de la défense de l'Europe
En bâtissant cet entrelacs d'institutions techniques que constitue l'Union européenne, on a offert à l'Allemagne un redoutable accélérateur de puissance. Au gré des différentes étapes que constituèrent la réunification, la création de la monnaie unique puis la crise de l'eurozone, la République fédérale a lentement étendu son pouvoir sur l'Europe institutionnelle, au cours d'un processus où l'on peine à faire la part des choix volontaires et du simple enchaînement déterministe des causes et des effets.
l'Allemagne, qui s'était déjà spécialisé dans l'usage à son profit de la main d'œuvre à bas coûts des pays de son hinterland d'Europe de l'Est, importe également, désormais, des travailleurs d'Europe du Sud fuyant la crise.
Les intérêts de l'Union européenne et ceux de l'Allemagne se trouvent désormais superposés.
Economie et restrictions tous azimuts , crise politique profonde liée à l'enserrement des souverainetés nationales dans un écheveau institutionnel sur lequel l'Etat le plus puissant a réalisé une OPA, l'Union européenne s'est muée en véritable trou noir économique et démocratique. Il ne lui reste plus, pour parfaire le tableau, qu'à devenir un trou noir géopolitique.
Les responsables politiques français, eux, se montrent sans cesse plus empressés d'avaliser cet état des choses, enfermant l'Hexagone dans le rôle humiliant de «poltron décisif» (Lordon) ou de de «poule mouillée de l'Allemagne» (Steve Ohana). C'est en Allemagne - et non à Bruxelles - qu'on se rend pour défendre les choix économiques français, pour obtenir des indulgences sur le projet de budget français bref, pour faire allégeance.
En Europe, une autre logique s’est mise en place avec la réunification de l’Allemagne et le projet d’union monétaire du traité de Maastricht, puis du pacte de stabilité, tous deux taillés suivant les exigences allemandes. La monnaie commune est placée sous la tutelle d’une banque centrale de conception hayékienne , qui n’aurait de comptes à rendre ni aux électeurs ni aux gouvernements, mais qui viserait l’unique objectif de la stabilité des prix. Dominant la nouvelle zone monétaire, il y aurait l’économie allemande, désormais élargie aux pays de l’Est, avec, juste à ses frontières, un énorme gisement de main-d’œuvre bon marché. Les coûts de la réunification ont été élevés et ils ont tiré vers le bas la croissance de l’Allemagne. Pour s’en dédommager, le capitalisme allemand a mis en œuvre une politique de répression salariale sans précédent, que les allemands ont dû accepter sous la menace d’une délocalisation accrue vers la Pologne, la Slovaquie ou au-delà.
La puissance allemande s’exerce sous des formes brutales, non par le haut commandement ou la Banque centrale, mais par le biais du marché . L’Allemagne, qui, plus que tout autre Etat, a été la responsable majeure de la crise de l’euro par sa politique de répression salariale à l’intérieur et de capital à bon marché à l’extérieur, a aussi été le principal architecte des tentatives pour faire payer la facture par les faibles. En ce sens, l’heure d’une nouvelle hégémonie européenne est arrivée. Avec elle est apparu, ponctuellement, le premier manifeste d’une suzeraineté de l’Allemagne sur l’Union.
L’Union européenne correspond précisément à ce modèle : un consortium essentiellement intergouvernemental réuni dans un Conseil européen dont les délibérations sont nécessairement « insonorisées » et dont seule la science-fiction pourrait imaginer qu’il devînt un jour « la fleur bleue de la démocratie, pure de tout résidu institutionnel terrestre . Mais, alors que les Etats représentés dans le Conseil européen sont des plus inégaux en taille et en poids, il serait irréaliste de penser qu’ils puissent se coordonner sur un pied d’égalité.
La France, dont l’arsenal nucléaire et le siège permanent au Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies (ONU) ne comptent plus pour grand-chose, doit réviser d’autant ses prétentions. L’Allemagne traite la France comme Otto von Bismarck le faisait avec la Bavière dans cet autre système fédéral que fut le IIe Reich, gratifiant le partenaire inférieur de faveurs symboliques et de consolations bureaucratiques .
On peut se demander pour combien de temps l’autosubordination française durera sans la moindre réaction a voir l’anxiété que montre la classe politique française de ne jamais être séparée des projets allemands dans l’Union, mais d’y être toujours associée.
L’Allemagne est en train de bâtir la plus grande armée conventionnelle européenne au sein de l’Otan, affirme son chancelier Olaf Scholz.
«Nous allons dépenser en moyenne entre 70 et 80 milliards d’euros par an pour la défense», a-t-il ajouté. «Et l’Allemagne sera alors le pays qui investit le plus» dans ce domaine».
« En tant que nation la plus peuplée, dotée de la plus grande puissance économique et située au centre du continent, notre armée doit devenir la pierre angulaire de la défense conventionnelle en Europe, la force armée la mieux équipée d’Europe ».
Notes:
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