Proches d’une sortie inédite de la démocratie au profit d’une gouvernance oligarchique soustraite à tout contrôle ,nous connaissons une accélération décisive des processus économiques et sécuritaires qui transforment en profondeur notre société ainsi que les rapports politiques entre gouvernés et gouvernants .
La crise elle-même est devenue un véritable mode de gouvernement de notre société .
Le réveil de l’activité politique démocratique par les citoyens à travers différentes formes,Gilets Jaunes et autres– « par le bas » – est le signe d'un affrontement politique,idéologique avec le système néolibéral .
Même la gauche dite de gouvernement s’est, depuis plusieurs années, rangée du côté du néolibéralisme. Après 2008, les choses étaient un peu suspendues. On pensait alors en terme de régulation ou de moralisation du capitalisme. Mais depuis 2009 et 2010, cette grande coalition néolibérale de droite et de gauche participe à l’accélération de la sortie de la démocratie. Il ne faut pas oublier non plus l’oligarchie économique et financière qui pousse vers la flexibilisation et la dérégulation.
Tout ceci au nom de la concurrence à outrance et de la compétitivité. Cette logique infernale empêche toute inflexion du cours des choses. Mais cette accélération existe aussi parce que les freins ne fonctionnent plus. La logique néolibérale détruit ou affaiblit tout ce qui pourrait s’y opposer : les syndicats, l’action citoyenne, les mobilisations… On observe même un délitement du lien social.
Le néolibéralisme est une logique normative globale ,de formatage des esprits et de l'existence ,qui tend à devenir un système et qui a pour principe la mise en concurrence des Etats, des institutions et des individus entre eux. On observe par exemple une mise en concurrence des services de transport, d’éducation de santé. Preuve que cette logique va bien au-delà du marché. La concurrence est un mode d’organisation de la société, un mode d’organisation même des pouvoirs publics. Cette logique divise et isole les personnes, ce qui tend à ne plus pouvoir agir collectivement.
Depuis les années 80, les crises renforcent la cause des crises, nourrissent le néolibéralisme. Il faut se rendre compte de cette réalité historique originale. La crise est devenue un mode de gouvernement.
Longtemps, les crises ont joué un rôle d’« avertisseur ». Elles ont poussé à des recadrages et à des équilibrages sociaux, etc. La crise de 1929, a donné lieu à l’extension de la sécurité sociale. On le voit, les crises ont engendré des réformes du capitalisme. Aujourd’hui, plus du tout ! Depuis les années 80, les crises renforcent la cause des crises, nourrissent le néolibéralisme. Il faut se rendre compte de cette réalité historique originale. La crise est devenue un mode de gouvernement. Les dirigeants préconisent une sortie de crise par une politique qui pousse encore plus à la concurrence et la compétitivité. Et, au nom de cette stratégie, on assiste à un « détricotage » de l’Etat social.
Le cas de la Grèce, est l’exemple le plus flagrant de cette politique par la crise
En regardant le phénomène grec à la loupe, on voit bien que la logique d’appauvrissement et de précarisation de la population, vise à défaire le lien de confiance des électeurs envers leurs élus et à pousser dans le sens d’un approfondissement de ce qui a causé le problème social.
La dette est aussi un outil de gouvernement.
Les "élites" ne regardent plus seulement les phénomènes économiques comme la dette ou le déficit indépendamment de la politique. Elles les analysent comme des moyens de gouvernement. La dette est devenue, depuis la crise des dettes publiques, le premier instrument de chantage et un moyen de pouvoir sur les populations. La Grèce est à cet égard un exemple-type mais il y a aussi l’Amérique latine. Et on a étranglé les Etats américains pour les conduire vers cette politique néolibérale. Ce qui a été fait par le FMI il y a 30 ans là-bas est aujourd’hui mis en place en Europe.
Les responsables sont donc l' oligarchie néolibérale. Comment s’est construit ce bloc ?
Ce bloc composé par l’oligarchie gouvernementale, les acteurs financiers, les grands médias et les institutions universitaires s’est construit peu à peu par des alliances d’intérêts qui pouvaient être différents mais qui sont devenus de plus en plus convergents. Il suffit de voir à quel point les responsables politiques sont aujourd’hui liés au monde économique.En France et partout ailleurs .
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Notes:
Christian Laval : « La crise est devenue un mode de gouvernement »